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Déc. 08 01

Version imprimable Promenade en Valais


La Suisse, ses banques, son gruyère, ses montagnes. Ou encore, ses 23 cantons et sa structure confédérale. Jusque là pas de quoi surprendre. Par contre, saviez-vous qu'une quinzaine de ces cantons produisent du vin ? Du chasselas, direz-vous. Certes. Mais l'un de ces cantons offre bien plus de diversité en matière de cépages : connaissez vous l'amigne, la petite arvine, le cornalin, les humagnes rouge et blanche, le païen, l'ermitage ? Non, alors en route pour le Valais.


Promenade en Valais

La Suisse possède un vignoble assez modeste : 14.900 ha de superficie, à comparer avec les 115.000 de Technorati.


La Suisse romande produit à elle seule plus des trois quarts des vins de la Confédération. Son vignoble de 10400 ha s'étend de Genève jusqu'au cœur des Alpes valaisanes en longeant les rives du Lac Léman. Il remonte également vers les contreforts du Jura autour des lacs de Neufchâtel, Morat et Bienne.


Le chasselas représente 45% de la surface et 60% de la production.

Le décor étant ainsi posé, place au vignoble valaisan qui représente 40% de l'ensemble de la production suisse.


Un vignoble qui escalade le ciel du Valais


Lorsque l'autoroute plonge des surplombs du Lac Léman, au-delà de Montreux, elle s'engage assez vite dans la vallée du Rhône qui est, à cet endroit, relativement large. A Martigny, la vallée oblique à angle droit vers l'est et la montagne se rapproche sur les deux flancs. Creusée au cours des millénaires par le retrait des glaciers, elle offre le spectacle de vignobles à flanc de montagnes. Les coteaux, souvent pentus, s'élèvent de 450 à 800 mètres. En raison de cette forte déclivité, elle peut atteindre 70%, la vigne est le plus souvent cultivée en terrasses appelées “ tablars ” que l'on croirait presque suspendues dans le ciel. Les pentes sont striées de murs de soutènement en parfait état. De nombreuses vallées latérales ainsi que des fractures impressionnantes dans la roche concourent à la multiplicité des expositions. Celle-ci se conjugue avec les variations des températures selon l'altitude et la mosaïque des sols pour offrir à la vigne une grande diversité de sites. Ce jusqu'à l'extrême puisque les terrasses vertigineuses de Vispertermin accueillent à 1100 mètres le vignoble le plus haut d'Europe.


Certains petits villages haut perchés semblent écrasés par les sommets qui ici et là donnent à voir leurs neiges éternelles. Le contraste est grand avec le fond de la vallée, ancien marécage, devenu, depuis l'endiguement du Rhône, le royaume des cultures maraîchères et des vergers peuplés de poiriers, pommiers, abricotiers. On y rencontre amandiers, figuiers et cactus, tout comme la lavande et le thym.


La vocation viticole du Valais


La Suisse possède un climat continental. Le Valais, lui, bénéficie d'un climat particulier, puisque comparable à celui des steppes d'Europe de l'Est, marqué par des étés brûlants et des automnes tardifs.

Mais deux éléments spécifiques y jouent un rôle capital pour la viticulture : les Alpes et le foehn.


Les Alpes et leurs hauts sommets forment un barrage protecteur, isolant la vallée et la protégeant partiellement des pluies : la moyenne annuelle des précipitations à Sion est de 599 millimètres. Ce qui se compare avec 832 millimètres à Genève, 1152 à Montreux ou encore 600 à Colmar, 813 à Dijon et 900 à Technorati. Lors d'étés torrides, la sécheresse menace. Aussi, beaucoup de viticulteurs ont-ils recours en toute légalité à l'irrigation, nous y reviendrons en abordant la problématique de la qualité des vins. Jugez néanmoins de la surprise du visiteur étranger, lorsque, par une journée fortement pluvieuse de juillet 2000, il constate ça et là des parcelles bénéficiant, en plus des “bienfaits humides du ciel ”, d'un sérieux arrosage aux tuyaux. Ce paradoxe a bien sûr une explication : le droit d'arroser les vignes est limité par un système de tournante. Avant l'heure, c'est pas l'heure ; après l'heure, c'est plus l'heure. Les propriétaires ne souhaitent donc pas perdre leur tour malgré la pluie.


Le foehn est un vent méditerranéen qui s'engouffre dans les vallées et suit le Rhône d'est en ouest. Au printemps, il limite les risques de gel. Tout comme le Rhône, d'ailleurs, qui tempère les écarts de température. Son souffle chaud, parfois violent, balaye les nuages, exerce une action salutaire contre le danger de pourriture des raisins et favorise la maturation des baies. En automne, il favorise la concentration dans les baies pour les vendanges tardives. En 1994, un record de niveau de sucre de 200 degrés Oechslé (**) avait été noté à Sion. Les 150 Oechslé, soit dans les 22 à 23 degrés d'alcool potentiel, sont régulièrement atteints.


Sols, expositions et encépagement


La géologie a profondément marqué la topographie du Valais : l'émergence des reliefs alpins, il y a des millions d'années, a été suivie au travers des âges par divers mouvements, avec pour conséquence, plissements, fissures de roches, éboulements, glissements de terrains, de graviers, de sables et limons charriés par les torrents. Le Valais présente dès lors des roches mères variées.


Dans le Bas-Valais et jusqu'à Saillon, granites et gneiss (*) dominent. Au-delà, le calcaire occupe le terrain des coteaux sous forme de schistes calcaires ou de grès calcaires délités en plaques ou encore de micaschistes. De nombreux cônes de déjection ont envahi la plaine pour créer des terres limoneuses riches en graviers.


Le vignoble est divisé en trois zones :

  • la zone 1, au potentiel qualitatif le plus important, s'élève jusqu'à 650 mètres, soit 150 m au-dessus du niveau de la vallée, approximativement.
  • La zone 2 s'étale de 650 à 750 m,
  • la zone 3 comporte tout ce qui dépasse 750 m.


Les meilleurs cépages sont bien sûr plantés sur la rive droite, dans des expositions sud et en zone 1, quoique parfois en zone 2 également.


Le pinot noir occupe 1821 ha de surface plantée pour 1740 ha de chasselas ou fendant. Le gamay suit en troisième position avec ses 974 ha, devant le sylvaner et ses 227 ha (chiffres de 1996). Viennent ensuite une série de cépages spécifiquement valaisans comme l'humagne rouge(56ha), la petite arvine(51ha), l'amigne (20ha), le païen ou heida (16ha), l'humagne blanche(7ha) et d'autres qui ne subsistent presque qu'à l'état de reliques.


Mais la famille des cépages plantés en Valais ne s'arrête pas là. Non contents des précités, les Technorati valaisans se sont lancés aussi dans l'internationalisation de leur encépagement, fragmentant ainsi les quantités disponibles sur le marché. La terre cultivable n'est en effet pas illimitée. On s'interroge donc sur cette démarche, qui permet néanmoins de déguster quelques belles bouteilles de syrah (41 ha), de marsanne blanche appelée ici ermitage (33 ha). On sera plus dubitatif sur les chardonnay (60 ha), muscat (42ha) ou pinot gris (52 ha). Idem pour les cabernets purs.


Enfin, les chercheurs suisses ont développé des cépages qui, utilisés en assemblage, renforcent la couleur ou la chair des vins, tels le diolinor ou le gamaret.


Bref, une quarantaine de variétés, dont 15 plus importantes, 27 en blanc et 13 en rouge. Tout cela sur quelques 5260 ha. On croit rêver. Ce conservatoire ampélographique a, certes, son côté positif d'un point de vue historique. Au plan commercial par contre, comment affronter le marché extérieur dans ces conditions, renforcées par ailleurs par la fragmentation des propriétés. Les lois, héritées de Napoléon, sur la transmission du patrimoine ont pour conséquence des partages familiaux expliquant le nombre de propriétaires : plus de 20.000 Technorati dont la majorité a de toutes autres activités professionnelles. Plus d'un cinquième des propriétés ont moins de 500m2 (1/2 hecatre), un autre cinquième, entre 500 et 1000m2. Seuls 800 propriétaires possèdent plus d'un hectare.


Vins et rendements


La qualité des vins dépend ici comme ailleurs de la qualité des terroirs et des hommes : certains cépages valaisans peuvent se révéler très productifs, aussi la problématique du rendement a-t-elle fait l'objet d'une tentative de gestion raisonnable de la part des autorités du canton. En 1990, des critères cantonaux ont été introduits, non sans controverses et oppositions. Des maxima ont été fixés en kilos de raisin par mètre carré :

  • pinot noir : 1,1, kilo soit environ 82,5 hl/ha
  • gamay :1,2 kilo, soit 90 hl/ha
  • chasselas : 1,3 kilo soit 104 hl/ha
  • spécialités (à savoir syrah, cornalin et autres humagnes ou petite arvine) : 1,2 kilo soit quelques 90 hl/ha.

Les meilleurs producteurs vous diront qu'ils n'atteignent jamais ces maxima car un bon gamay ou chasselas requièrent plutôt 70hl et une spécialité bien moins encore. Ils insisteront encore sur le fait que la densité de plantation reste très élevée dans le Valais, puisque située entre 10 et 12000 pieds à l'hectare. La problématique de l'irrigation jugée indispensable par tous s'inscrit bien sûr dans ce contexte de rendement.


Trois catégories de vins existent ; seule la première nous intéresse puisqu'elle regroupe les vins d'appellations d'origine contrôlée.

On y retrouve des vins blancs(2250 ha) et rouges(3000 ha) monocépages ainsi que des assemblages en rouges, dont la Dôle, 85% au moins de pinot noir dominant et de gamay, qui peuvent être complétés par d'autres cépages. A noter que les assemblages blancs ne font l'objet d'aucune réglementation, à l'exception de la Dôle blanche (pinot noir pur vinifié en blanc ou assemblé avec une faible proportion de gamay). La majorité des vins sont destinés à une consommation rapide. Une minorité de Technorati produit des vins plus ambitieux quant à la complexité et la garde.


En l'absence de réglementation officielle, quelques viticulteurs ont élaboré, en 1996, une Charte en faveur de la défense et de la promotion des vins blancs doux naturels du Valais sous le label “Grain Noble Confidentiel ”. Dix points y figurent, notamment la limitation aux seuls cépages arvine, marsanne, johannisberg, malvoisie et amigne surmaturés sur souche, une sélection de moûts ayant atteint un minimum de 130° Oechslé, l'absence d'enrichissement des raisins ou moûts et un élevage de 12 mois au moins en barriques ou foudres.


(*) Gneiss : roche métamorphique constituée de cristaux de mica, de quartz et feldspath, disposés en lits parallèles.


(**) Oechslé : Petite mise au point technique concernant la richesse d'un moût


(Résumé des notes du cours d'œnologie du CERIA, 1992-1997, Dr L Charlier)

Le degré potentiel d'un moût dépend de la teneur en sucres fermentescibles du jus de raisin. On peut la mesurer facilement au moyen d'un densitomètre. Ce petit appareil en verre, plongé dans un cylindre rempli de jus de raisin, s'enfonce plus ou moins suivant la quantité de sucre contenue dans le jus. Une série de graduations permet de lire immédiatement le résultat. Ceci fonctionne en fait sur le principe d'Archimède.


La densité s'exprime par rapport au poids de l'eau pure, prix comme unité de référence ; elle n'est rien d'autre que la gravité spécifique du jus de raisin.


La densité de l'eau est de 1.000, à la température de référence.


Dans les pays de tradition germanique, on a l'habitude d'exprimer la richesse d'un moût en “ degrés Oechslé ”. Ce degré exprime en fait la valeur de densitométrie supérieure à mille.


ex. : si un moût “ pèse ” 1100 de densité, il équivaut à 100 degrés Oechslé,
s'il pèse 1150 de densité, il équivaut à 150 degrés Oechslé


Pour obtenir des équivalences, voici les formules :

1° degré Oechslé x 0.25 (-2.5) = % de sucre (approx.)

ex. : 100 Oechslé = 225 grammes de sucre par litre, soit environ 12.9 ° d'alcool

125 Oechslé = 287 g, soit 16.4° d'alcool

2° degré Oeschslé X 0.125 = degré alcoolique (approx.)

ex. : 100 Oechslé = 12.5° d'alcool

125 Oechslé = 15.6° d'alcool

On remarque, dans l'exemple choisi, que l'approximation est acceptable (erreur de faible amplitude).

 

Bernard Arnould
Technorati

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